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- The raid, de Gareth Evans (Indonésie, 2011)
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A l’UGC George V
Quand ?
Jeudi soir, à 20h
Avec qui ?
Seul
Et alors ?
The raid vient occuper un créneau très bien défini, celui du film de castagne principalement à mains nues, exotique car venant d’Asie du Sud-est. Oubliez la Thaïlande de Ong bak et Bangkok dangerous, la destination est cette fois l’Indonésie, mais la cargaison reste similaire : un scénario prétexte, fait d’enjeux vagues et des personnages transparents, un metteur en scène adroit, des acteurs guerriers funambules qui s’acharnent les uns contre les autres. A ce programme minimaliste et payant, l’auteur-réalisateur Gareth Evans se pique d’ajouter une dose de sophistication en concentrant l’intégralité de l’action dans un immeuble aux étages remplis de sbires d’un boss mafieux retors à souhait. Ce surplus d’ambition se retourne malheureusement contre lui, l’exécution n’égalant pas l’intention.
On y croit pourtant, le temps d’une première demi-heure épatante, qui nous prend à la gorge par sa vitesse, sa férocité, l’absence de retenue et d’arrière-pensée dans ses coups. Le film se lance de la meilleure des manières, de l’entrée de l’escadron policier dans l’immeuble jusqu’au choc monumental que représente la première bataille d’envergure. Evans réalise alors un sans-faute de mise en scène, mêlant intelligence et engagement total. Sa caméra portée ultra réactive accomplit des merveilles, en se faufilant à sa guise dans l’immeuble à travers les murs et plafonds, le long des couloirs, via le réseau de caméras de surveillance ; puis en nous immobilisant au cœur de la fusillade, laquelle se mue en un carnage d’une sauvagerie terrifiante. Pendant tout ce temps le regard du film est aux côtés des forces de l’ordre, mais le point de vue véritable est celui des méchants, qui guettent, contrôlent les opérations, et sont déterminés à exterminer les intrus jusqu’au dernier. C’est un point de vue d’une puissance aussi dévastatrice que volatile, nécessitant énormément de volonté et d’idées pour perdurer sur tout un long-métrage. C’est là que The raid révèle sa faille majeure : dès lors qu’il a impitoyablement réduit à peau de chagrin les effectifs d’un des deux camps en présence, il interrompt précipitamment son entreprise d’écrasement et se range dans une voie de garage, confortable et neutre.
Chaque micro-événement du scénario donne lieu à un affrontement où volent coups de poings, de pieds, de tête, d’accessoires récupérés sur place. Les situations varient – en couloir ou appartement, en un contre un ou en déséquilibre numérique – mais entre le récit qui reste figé dans un état stationnaire et la mise en scène qui n’invente plus rien, c’est tout le film qui se voit dégradé à l’état auxiliaire de simple support à une exhibition d’arts martiaux. Loin des promesses de mix enragé entre Assaut de Carpenter et le jeu vidéo, The raid se plie dans ce deuxième temps à une restrictive logique d’ordre pornographique. Il empile sur un mode répétitif des scènes pensées pour procurer au spectateur le seul plaisir immédiat du combat, quitte à recourir à des prétextes vaseux (avec dans le rôle de l’appel fallacieux au plombier, le monologue « je te tiens en joue avec mon flingue mais je le balance, car les vrais hommes règlent plutôt les choses avec leurs poings »). C’est assurément accompli techniquement : les combattants ne ménagent pas leurs efforts, et Evans sait capter leur débauche d’énergie sans en perdre une miette, grâce à un positionnement au plus près et un découpage d’une fluidité exemplaire. Mais au regard de tout le potentiel que le début de The raid contenait, c’est bel et bien un gâchis de ne s’en être tenu qu’à cette partie simpliste du programme.
Il faut attendre le dernier quart d’heure pour que refasse surface l’ambition de faire un film, et non pas simplement de filmer un flux d’actions. Ce redémarrage est explicite à l’écran : il intervient lorsque les personnages repartent à l’assaut de l’escalier principal de l’immeuble, après s’être réfugiés dans des couloirs annexes après la fusillade inaugurale. L’ultime combat, à deux contre le boss de fin de partie, ajoute ainsi enfin à la virtuosité martiale un contexte fécond, un souffle épique, un engagement dramatique. C’est spectaculaire (la séquence est dantesque, inouïe) et en même temps un crève-cœur – on a sous les yeux tout ce que le reste du film aurait dû être. D’ailleurs il n’y a pas de miracle, malgré ce sursaut de dernière minute la conclusion de The raid ne parvient pas à convaincre faute d’enjeux, de personnages, de lieux même (puisque l’idée du décor unique et spécial de l’immeuble est depuis longtemps passée à la trappe) correctement développés.