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- Le daim (France, 2019), de Quentin Dupieux
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A la maison, en DVD édité par Diaphana Edition Video (sorti le 5 novembre 2019 en DVD, Blu-Ray et VOD) et obtenu via Cinetrafic dans le cadre de leur opération « DVDtrafic »
Quand ?
Samedi soir
Avec qui ?
Seul
Et alors ?
Accueilli par les critiques comme l’un des excellents longs-métrages de 2019, Le daim est le deuxième film du cinéaste Quentin Dupieux depuis son retour en France, un an seulement après le précédent (le suivant, Mandibules, est à son tour prévu dès l’année prochaine). De Au poste !, son prédécesseur, Le daim reprend trois caractéristiques : la durée réduite au strict minimum (1h15), la présence d’une figure comique réputée dans le premier rôle (Jean Dujardin, après Benoît Poelvoorde), un récit émaillé de décès absurdes et inattendus. Mais cela ne signifie pas pour autant que Dupieux serait devenu un équivalent français de Woody Allen, proposant une succession de déclinaisons annuelles autour des mêmes thèmes et motifs. Il en serait bien incapable, allergique qu’il est aux notions de redite et de zone de confort. Si ses obsessions profondes restent les mêmes, les histoires de fous dans lesquelles il nous embarque changent du tout au tout d’une fois sur l’autre.
Dans sa filmographie, Le daim se rapprocherait ainsi plus de Rubber – aux différences près que l’un se déroule dans les montagnes françaises et l’autre dans le désert californien, que le tueur en série de l’un est un humain et celui de l’autre est un pneu. Ce qui fait pas mal de différences, auxquelles on peut en prime ajouter le fait qu’il y a un soupçon de Nonfilm (le premier… film de Dupieux) dans Le daim, avec ce protagoniste filmant à la caméra numérique sans donner l’impression de savoir ce qu’il fait. Cela nous amène au cœur de ce que raconte Le daim : un possible autoportrait semi-cauchemardesque du cinéaste. Le look adopté par Dujardin pour devenir le personnage de Georges, en particulier sa barbe fournie, le transforme en double de Dupieux à la ressemblance troublante. Et sa vraie-fausse activité professionnelle renforce la connexion : Georges se présente comme un réalisateur de films, un art qu’il pratique en autodidacte et en quasi autonomie avec une minuscule caméra, comme Dupieux aime à le faire (Rubber, par exemple, a été tourné pour un budget minuscule et avec un appareil photo numérique réglé en mode vidéo).
En tant qu’outsider, Dupieux a peut-être souvent eu (et a peut-être encore) peur de n’être qu’un imposteur ; une angoisse qui devient partie intégrante du scénario puisque Georges est clairement un imposteur, inculte en tout ce qui a trait au cinéma et incapable de tirer des images correctes de la caméra qui lui est arrivée par hasard entre les mains. C’est le premier étage de la fusée qui transforme Le daim en un cauchemar. Le deuxième étage est le caractère psychopathe de Georges. Une fois en possession d’une veste en daim qui lui donne, selon ses propres paroles, un « style de malade », Georges développe le fantasme de devenir le seul individu sur Terre à porter un blouson – quitte à assassiner tous les autres. Quentin Dupieux n’a a priori tué personne, mais le sujet l’inspire grandement, à en juger par la créativité ébouriffante qu’il démontre pour imaginer les meurtres dont il rend Georges coupable (entre autres au moyen d’une pale de ventilateur).
Le troisième et dernier étage est le plus angoissant de tous. On rit joyeusement du ridicule de Georges, on rit encore volontiers de sa folie meurtrière brillamment surréaliste et cartoonesque ; on rit plus difficilement, ou alors très jaune, du monde qui l’entoure. Un monde sordide (aux teintes uniformément jaunâtres et maronnasses propices à la dépression), désert (dans les rues et les bâtiments des villages pyrénéens où se déroule le film, les humains que l’on croise se comptent sur les doigts d’une main) et néanmoins hostile – on nous fait comprendre qu’avant de tourner tueur en série mythomane, Georges a été abandonné de tou.te.s. Le plus effrayant dans tout cela, c’est qu’autant le personnage de Georges et ses atrocités relèvent de la pure invention fictionnelle, autant le monde accablant dans lequel il évolue… est aussi réel que possible. La violence de la société capitaliste contemporaine envers les individus n’est plus à démontrer, et le commentaire audio de Quentin Dupieux et Jean Dujardin (le seul bonus, malgré la promesse de scènes coupées – possiblement victimes de l’échec commercial du film) nous apprend que l’essentiel des lieux ont été pris tels quels pour le tournage, y compris dans leur caractère désertique. La morne réalité est le vrai cauchemar, auquel la démence de Georges est une – mauvaise – réponse désespérée ; une question de survie, par l’absurde, comme le sont tous les longs-métrages de Dupieux.
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