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- Journal de France, de Claudine Nougaret & Raymond Depardon (France, 2012)
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Au Balzac, en avant-première dans le cadre du Champs-Élysées film festival
Quand ?
Mardi soir
Avec qui ?
Seul
Et alors ?
Raymond Depardon a réalisé quantité de films documentaires d’exception, de Urgences à Délits flagrants, de 10è chambre à la série des Profils paysans. Cette fois, son Journal de France est la proie de défauts tristement ordinaires : une ambition maladroite de « faire l’artiste », l’absence d’un point d’ancrage solide à partir duquel le récit pourrait se déployer harmonieusement. Présenté d’entrée explicitement comme un prétexte, son fil conducteur horizontal, une tournée photographique en camping-car de Depardon à travers la France, ne parvient jamais à prendre son essor. Sa mise en scène est bien trop précaire pour cela, à tous points de vue – l’usage de la musique, du montage, de la voix-off, trahit les lacunes du duo Nougaret-Depardon dans la pratique de l’autofiction, nouvelle pour eux. Et même dans son contenu, l’entreprise ne convainc qu’à moitié. Elle comporte de beaux moments, réflexions pertinentes, rencontres touchantes, mais le pays visité est on ne peut plus homogène, et donc bien trop parcellaire pour ne pas souffrir du poids de ce qui est laissé hors champ. Car de département en département, il n’est question que de villages et petites villes ruraux, de campagnes, de bords de mer ; aucune zone urbaine ou périurbaine ne vient déranger ce diaporama de paysages cousins, tous similaires. C’est une France, pas la France.
L’autre part du film, sa ligne de fuite verticale, est une rétrospective chronologique des œuvres passées de Depardon depuis ses premiers reportages dans tous les points chauds du monde (Biafra, Prague, Tchad) jusqu’à ses face-à-face avec les institutions françaises. Là encore, difficile de mettre sur le doigt sur un intérêt substantiel à accorder à un tel exercice, une fois mis de côté le plaisir mineur pour Nougaret et Depardon d’apprécier le chemin parcouru, et pour le spectateur de se découvrir une envie de (re)voir les documentaires en question. Il émane de ce Journal de France, par gaucherie plus que par suffisance, un parfum de nombrilisme ; et une apparence de zapping plus embarrassante encore. Le hasard a fait que j’ai parlé récemment à propos de Pina du mal qui frappe en effet le film de Nougaret et Depardon : la présentation d’extraits d’œuvres coupés de leur contexte les rend orphelins, affaiblis, voire inopérants. Depardon se montre au final bien moins inspiré quand il se regarde lui-même que quand il observe les autres. À y réfléchir, ce n’est peut-être pas une si grande faille.