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- Taken, de Pierre Morel (France, 2008)
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Chez un ami, en DVD
Quand ?
Mercredi soir
Avec qui ?
Une bande de copains
Et alors ?
Cela fait maintenant plus de dix ans que Luc Besson a fait de la réalisation son métier annexe, presque un hobby, pour se consacrer plus particulièrement à la production avec sa société EuropaCorp. Il est ainsi devenu un colosse aux deux visages : d’un côté mogul pouvant se targuer d’être seul à faire du cinéma commercial made in France, rentable et exportable même aux USA ; de l’autre pur entrepreneur remisant au placard toute ambition, même mineure, de qualité cinématographique. Sans même parler de valeur artistique, ou d’une facette de la personnalité de l’auteur qui percerait derrière l’action, il s’agirait simplement de voir transparaître à l’écran l’aspiration au travail bien fait, à l’exécution d’un divertissement honnête et soigné. Même de ce service minimum, il n’est pas question dans les productions Besson qui inondent les écrans des multiplexes plusieurs fois par an. Et c’est ce qui choque le plus chez elles.
Car on pourrait presque pardonner à Taken son déversement constant, débile et débilitant, de brutalité et de haine. Passer l’éponge sur son racolage actif prodigieux de lourdeur envers le public américain, que même les réalisateurs du cru n’osent pas caresser à ce point dans le sens du poil parano et suffisant. L’opposition entre les Etats-Unis, territoire préservé, et le reste du monde, où la gangrène du vice et de la corruption est généralisée et le danger omniprésent dès la première seconde, est portée à un degré de caricature repoussant les limites du risible. Absolument tous les personnages croisés par les héros en goguette à Paris sont méchants, les riches comme les pauvres, les officiels comme les anonymes, les blancs comme les barbus d’Europe de l’Est ou du Moyen-Orient. Quant aux américains, LePapa (Liam Neeson) et LaFifille (Maggie Grace), le film prend soin de les maintenir immaculés en toutes circonstances. Elle, bien que kidnappée par un réseau mafieux qui drogue et prostitue ses victimes, restera pure jusqu’au bout. Lui bénéficiera d’une impunité intégrale et jamais testée tout le temps que durera son carnage (35 morts selon le décompte d’IMDb) accompli au grand jour et sans la moindre retenue.
Ce dernier point, le blanc-seing donné aux héros, est le seul sur lequel l’ersatz de scénario fait un effort discernable. Et c’est pour cela que Taken est une horreur indéfendable : il ne s’embarrasse même pas à donner le change. Rien n’y est développé, en amont comme en aval d’un évènement, sur la durée d’une séquence ou de plusieurs. A tous les niveaux, action, suspense, atmosphère, le néant règne. Le film ne pousse la porte ni du cauchemar d’une théorie du complot, ni de l’outrance bon enfant d’un roller coaster, façon Expendables. Tout en refusant d’être pour de rire (le film est d’un sérieux implacable), il n’a aucune velléité de mettre en place une trame d’investigation correcte : LePapa arrive quelque part, tue tout le monde en tirant dans le tas, après quoi un effet de deus ex machina se charge de lui fournir un indice le menant à sa destination suivante. En conséquence de quoi LePapa ne rencontre pas le moindre obstacle ou revers sur sa route, rendue aussi ennuyeuse qu’un tapis roulant d’aéroport. Jamais coincé intellectuellement, il n’est pas plus tracassé physiquement. Le must étant ce moment où la canalisation à laquelle les méchants l’ont menotté casse immédiatement après le début de la scène (et tant qu’à faire assomme au passage un des sbires).
Le ridicule ne tue pas, mais il retire tout intérêt aux scènes d’action de Taken, qui auraient pourtant pu être le joker sauvant ce film comme tant d’autres du genre. Sans une once d’intérêt de quelque ordre que ce soit pour sa défense, et sans avoir rien fait pour en obtenir, Taken est nul, purement et simplement. Sa seule raison d’être, l’entreprise d’abrutissement du public, y est exhibée à nu, sans aucune pudeur. Et le public ne se plaint pas, il trouve même cela à son goût puisqu’il a fait un triomphe au film (145 millions de $ de recettes aux USA, presque six fois son budget) ainsi qu’à sa suite (déjà au-dessus des 100 millions de $, et des 2 millions et demi de spectateurs en France). Puisque plus c’est mauvais, mieux ça marche, le business de Luc Besson n’est pas près de connaître la crise.