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1) Clint Eastwood : Lettres d’Iwo Jima / Mémoires de nos pères, Mystic River, Gran Torino,
Million dollar baby
2) Steven Spielberg : Minority report, La guerre des mondes, A.I., Munich,
Arrête-moi si tu peux
3) Michael Mann : Collateral, Miami Vice, Ali
4) Southland tales (de Richard Kelly, USA, 2006-2007)
5) The host (de Bong Joon-Ho, Corée, 2006)
6) La graine et le mulet (de Abdellatif Kechiche, France, 2007)
7) Cloverfield (de Matt Reeves, USA, 2008)
Time & Tide (de Tsui Hark, Hong Kong, 2000)
9) The dark knight (de Christopher Nolan, USA, 2008)
10) Les chansons d’amour (de Christophe Honoré, France, 2007)
Le spectre couvert par le concept de Top 10 de la décennie est si vaste (me concernant, le chiffre de 1500 « candidats » ne me semble pas aberrant) que la qualité des films ne peut à
mon sens suffire à elle seule à sélectionner les lauréats. L’importance du film sur le long terme – en tout cas ce que l’on peut en pressentir –, ce qu’il dit de ces années 2000 ou bien ce qu’il
y a imposé comme nouveauté, comme rupture, voilà quelques uns des critères qui doivent également, si ce n’est plus, rentrer en ligne de compte.
Ce système fait une victime principale : Quentin Tarantino, dont les Kill Bill et Inglourious Basterds comptent parmi les plus forts orgasmes cinématographiques de la décennie. Leur seul
défaut est, en quelque sorte, d’être trop intemporels dans leur rapport au monde s’effectuant uniquement au travers du prisme de la cinéphilie… Ce sont trois autres cinéastes américains qui ont
selon moi survolé les dix dernières années, avec pour chacun non pas un mais plusieurs longs-métrages majeurs. Ils trustent donc le « podium » de ce top sans mention d’un film en
particulier – même si le premier cité à chaque fois pourrait bien être celui ayant ma très légère préférence.
Eastwood arrive évidemment en tête. Lui qui avait déjà brillé au cours de la décennie précédente (Impitoyable, Sur la route de Madison), et dont l’on pensait qu’il
allait s’en tenir là, a trouvé une voix et une vigueur – il n’arrête pas de tourner ! – nouvelles et inestimables. Il interroge le passé (Lettres d’Iwo Jima / Mémoires de nos pères) et le
présent (Gran Torino), les communautés
(Mystic River) et les individus (Million dollar baby), avec un style formel définitivement affirmé et qui en même temps reste ouvert à l’inconnu et à la nouveauté.
Lorsqu’il s’implique entièrement dans un film, Eastwood parvient désormais à tous les coups à y insuffler une émotion débordante. Il nous fait pleurer comme des madeleines, tout en nous rendant
possiblement plus intelligents, plus tolérants – un peu meilleurs, qui sait ?
Ses deux dauphins dans ce classement sont des réalisateurs que l’on identifie plus immédiatement aux années 2000, en raison de leur remarquable appropriation des innovations technologiques de
cette période : les images de synthèse pour Spielberg, les caméras numériques HD pour Mann. Du coup, ils en ont profité pour donner chacun un grand coup de balai dans leur genre de
prédilection – respectivement la science-fiction (A.I., Minority report, La guerre des mondes) et le polar (Collateral, Miami Vice). Plus important, les deux hommes ont atteint à cette
occasion une maturité thématique et une cohérence qui n’étaient encore qu’en gestation auparavant. C’est surtout criant chez Spielberg, qui n’est plus du tout le même homme entre les années 90
(où il forçait maladroitement le passage vers le statut de cinéaste important, à coups de Liste de Schindler et autres Il faut sauver le soldat Ryan) et les années 2000 où il remporte la mise en se montrant plus
franc – et du coup infiniment plus pessimiste aussi (La guerre des mondes, Munich).
Les films solitaires, maintenant. A en relire la liste, je me rends compte qu’il s’agit pour la plupart d’œuvres pouvant être rangées dans la – vaste – mouvance « Mad Movies » :
films d’horreur, de science-fiction, d’action, de monstres, de super-héros. Echappent à cette classification les deux représentants du cinéma français : La graine et le mulet et Les chansons d’amour, sortis à quelques mois d’intervalle et
faisant éclater au grand jour le talent de deux jeunes cinéastes farouchement indépendants et dont l’on attend encore beaucoup.
Quant aux cinq films « Mad », le temps dira si leur présence en masse est le simple fait d’une propension particulière de ma part à être facilement impressionnable par leur espèce, ou
bien s’ils étaient effectivement les plus à même de saisir l’air du temps de la décennie – qui pourra alors être résumée en un mot par l’adjectif « chaotique ». Certains de ces
longs-métrages ont renversé les anciennes règles de cinéma pour en instaurer de nouvelles (Time and tide, Cloverfield), d’autres ont chroniqué, au niveau
géopolitique, le bouleversement d’autres règles, celles de la toute-puissance américaine (The dark knight) ; et d’autres encore ont fait tout ça à la fois – Southland Tales, The host qui prennent
ainsi les deux premières places du classement hors cinéastes hors concours. Southland Tales est le meilleur exemple de cette notion de pari sur l’avenir qui nourrit ce Top. Peuplé
objectivement de défauts, ce film pourrait cependant bien être celui qui, sur le long terme, aura le mieux su capter l’esprit des années 2000 par ses excès en tous genres, son hétérogénéité
inconciliable (on a affaire là à un véritable caméléon), et sa douloureuse angoisse intérieure.
Enfin, il est important de citer une œuvre qui, au moins par la démesure de sa production (et aussi, tout de même, par la qualité du résultat), a marqué la décennie écoulée : la trilogie du
Seigneur des Anneaux portée à bout de bras, à cheval sur deux millénaires – écriture du scénario en 1997, sortie du dernier volet fin 2003 – par Peter Jackson.