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« Le cinéma est manipulateur par essence. […] Si la manipulation dans Lebanon est effectivement au service d’une réflexion contre la guerre, d’un message
humaniste, alors j’ai bien fait mon travail ».
Telle est la réponse du réalisateur israélien Samuel Maoz à la question posée par le journaliste des Cahiers du Cinéma (et par d’autres aussi, dans d’autres publications) à propos de sa
propension à ponctuer son film de scènes « choc », pensées pour générer une réaction épidermique et ainsi orienter sans ambivalence l’opinion du spectateur dans une direction nette,
tranchée. La scène la plus souvent prise en exemple de ce procédé est celle où une civile libanaise, fuyant sa maison réduite en cendres par un obus, se retrouve en plein milieu de la rue – et du
cadre – à moitié nue, ses vêtements déchiquetés.
Le film en lui-même ne m’a que peu marqué – la première séquence suffit à en embrasser le propos, et le reste ne donne à voir qu’un surplace fastidieux et n’apportant rien de neuf au genre du
film de guerre. Ennui poli, donc, si n’apparaissait cette justification donnée par le metteur en scène à sa démarche. Que le cinéma soit manipulateur, c’est en effet une évidence, un fait gravé
dans le marbre. Le simple acte de positionner une caméra pour capter une scène, et les décisions (ou non-décisions) qui accompagnent cet acte, influent inévitablement sur la perception que le
spectateur aura de la scène en question. Mais partir de ce constat de dangerosité et de perversité pour s’en servir comme d’une arme plutôt que pour le triturer, le questionner, est au mieux une
marque de grande inconséquence et au pire une manœuvre à la mauvaise foi inexcusable.
Deux raisons à cela : l’une d’efficacité et l’autre de morale. On ne peut espérer aucune victoire à long terme en usant des méthodes de son ennemi, qu’il s’agisse de dénoncer la guerre au
moyen d’un film spectaculaire ou de financer une entreprise aux valeurs socialement justes en spéculant en bourse. Dans les deux cas, le système que l’on croit ébranler est le seul vrai
vainqueur : l’ivresse du spectacle comme celle des profits financiers le nourrit immédiatement, en même temps qu’elle détourne l’attention de l’objectif de départ. Le recours au
spectaculaire, par essence simplificateur, ne peut qu’enfoncer des portes ouvertes et réduire le message, quel qu’il soit, à une coquille vide. Sur le plan moral, l’association d’un
« message humaniste » et d’une « manipulation » est évidemment contre-nature. Employer cette méthode de manipulation, c’est en légitimer l’usage – y compris
par ceux que l’on abhorre, que l’on combat. Le cinéma regorge de suffisamment de déconstructions brillantes de ces techniques manipulatoires et de leurs dérives totalitaires naturelles
(récemment : en mode majeur, Redacted du
maître en la manière De Palma ; en mode mineur, les faux bonus d’Inglourious Basterds) pour rejeter en bloc les affirmations de Maoz et la mise en pratique qu’il en fait.
j’avoue ne pas être trop d’accord avec toi… l’article et la critique des cahiers m’avaient déjà un peu fait bondir… et puis leurs accusations politiques envers le cinéaste sont pas très bien
justifiées je trouve…
mais c’est vrai qu’on peut se poser la question de la manipulation devant ce genre de film… j’ai plutôt pris le parti de trouver ça génial, surtout pour un tel discours anti-guerre, mais ça peut
être vu comme de la propagande à l’envers, en effet…
oui, c’est la zone grise entre convaincre et forcer la main… où il est toujours risqué de se hasarder pour un réalisateur