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- Osterman week-end, de Sam Peckinpah (USA, 1982)
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En 2 fois (avec quelques jours d’intervalle entre les 2 parties)
Au tournant des années 80, plusieurs grands réalisateurs américains ont jeté toutes leurs forces dans des chants du cygne d’une violence et d’une démesure désespérées, alors que le rouleau compresseur conduit par le tandem Lucas – Spielberg rendait irréversible la victoire d’un cinéma facile d’accès, spectaculaire et manichéen contre les films adultes, rebelles et ambigus qui avaient nourri le Hollywood des seventies. Apocalypse Now, La porte du paradis, Scarface et autres Raging Bull seront pour leurs auteurs respectifs les dernières œuvres ambitieuses avant longtemps – voire les dernières tout court. Osterman week-end, l’ultime bataille de Peckinpah, est à la fois plus définitive (il s’agit là de son dernier long-métrage) et plus mineure, puisque le réalisateur de La horde sauvage et des Chiens de paille signe là une œuvre de commande, sur laquelle il ne possédait même pas le final cut.
Pour corser encore l’affaire, Osterman week-end est au départ le premier roman de Robert Ludlum, publié uniquement après le succès de la trilogie Jason Bourne et non pas sur de quelconques qualités littéraires. Il reste du coup à Peckinpah bien peu de moyens de sauver les meubles – ne parlons même plus de la possibilité de finir sur un coup d’éclat. Alors, fidèle à lui-même, le cinéaste va tout saboter. La scène de poursuite en voiture artificiellement greffée au scénario : sabotée par un découpage frénétique qui tourne à l’auto-parodie. La logique d’un complot empêtré dans les doubles jeux de chacun : sabotée par l’absence totale d’éclaircissements jusqu’à la toute fin. Le casting plutôt haut de gamme (Rutger Hauer, Burt Lancaster, Dennis Hopper, John Hurt) : saboté par des choix de mise en scène qui mettent en valeur l’héroïsme et la lucidité de seconds couteaux méconnus – en particulier les 2 actrices Meg Foster et Helen Shaver – face à la lâcheté et l’impuissance des personnages interprétés par les stars.
En définitive, Peckinpah ne filme avec soin que ce qui l’intéresse – ses actrices donc, mais aussi le délitement des relations humaines (un groupe d’anciens amis aujourd’hui tous suspicieux les uns des autres, le voyeurisme auxquels tous les personnages se livrent avec délectation par le biais des caméras de surveillance), et surtout une fabuleuse séquence d’action aussi interminable que splendide. Pendant plus d’un quart d’heure s’opposent, dans une profonde obscurité, technologie de pointe et armes rudimentaires dans un ballet grisant et réglé au millimètre. Le genre de scène qui vous fait oublier tout ce qui cloche par ailleurs dans un film. L’épilogue est lui aussi très marquant, avec une charge en forme de baroud d’honneur contre l’inconséquence de la télévision et de ceux qui la regardent. Le monologue du héros et sa mise en application en parallèle pourraient être taxés de candeur tellement ils sont frontaux, si en 25 ans les exemples ne s’étaient pas accumulés pour appuyer les dires prémonitoires et désabusés du cinéaste.
Les suppléments de l’exhaustive édition double DVD dans laquelle sort le film mélangent matériaux américains issus du zone 1, et bonus français rajoutés par Opening. En 2 fois 10 minutes (un entretien consacré à Peckinpah et un autre sur Ludlum), les seconds écrasent par leur concision et leur pertinence les premiers, où les quelques informations intéressantes sont noyées dans un documentaire d’1h15 complètement formaté qui survole tous les sujets et un commentaire audio à 4 voix qui ne tient pas ses promesses. Avec l’un des historiens conviés braqué jusqu’à l’aveuglement contre le film et un autre tellement heureux d’avoir compris le scénario qu’il paraphrase les scènes les unes après les autres, ils ne sont plus que 2 à tenter d’élever un tant soit peu le débat – et à proposer quelques pistes intéressantes de convergence avec Chiens de paille et les autres films du réalisateur.
Le dernier supplément est un premier montage du film (proposé avec l’option intelligente d’accéder directement aux passages modifiés), qui se rapproche de facto d’une director’s cut. On y découvre que la haine qu’avait Peckinpah envers les producteurs n’était pas toujours fondée, puisque dans le cas présent la plupart des modifications apportées rendent le film plus efficace et plus fluide – le meilleur exemple étant le remontage de la fin. Cet aspect de la production d’Osterman week-end n’est traité que sous l’angle anecdotique dans le documentaire, alors qu’il y avait visiblement mieux à faire.