• Ensemble, nous allons vivre une très, très grande histoire d’amour, de Pascal Thomas (France, 2010)

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ensemble-1Où ?

Au Majestic Bastille, cinéma indépendant visité pour la première fois et à la grande salle très agréable

Quand ?

Vendredi après-midi

Avec qui ?

MaFemme

Et alors ?

 

Quand une bonne comédie française atteint les écrans de cinéma, il faut que ça se sache. Alors ici, nous l’avons clamé haut et fort dernièrement pour
Tout ce qui brille
; et nous recommençons pour le nouveau film de Pascal Thomas, au titre à rallonge. Thomas vit depuis une dizaine d’années une deuxième carrière, faite
de comédies policières un peu faciles et désuètes (Mon petit doigt m’a dit, L’heure zéro) et de projets plus ambitieux dans leur décalage
joyeux par rapport aux recettes et aux codes établis – Mercredi folle journée, Le grand appartement. Ces seconds ont évidemment ma préférence,
leur voix unique (douce-amère pour le premier, absurde et épicurienne pour le deuxième) compensant tout à fait la certaine légèreté de leurs scénarios.
Ensemble… appartient à ma grande joie à cette seconde catégorie ; et à ma encore plus grande joie, il reprend à son compte la solidité narrative des œuvres de la
première.

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Thomas est en effet reparti d’un script resté inutilisé écrit par Age & Scarpelli, deux des figures majeures de la grande époque de la comédie italienne ; on leur doit Ces messieurs dames, Les
monstres
, Casanova’70
L’histoire d’Ensemble… est donc logiquement aussi difficile à résumer que celles de ses glorieux ancêtres ou des bijoux de Wilder (La garçonnière, Irma la Douce typiquement) : les gags et les tournants
de l’intrigue s’enchevêtrent jusqu’à se rendre indissociables à nos yeux, ce qui est la meilleur chose que l’on puisse souhaiter à une comédie. Je ne vais donc rien résumer, mais je vais un peu
présenter tout de même. Dans un France sans âge – ce qui ne veut pas dire passéiste –, la « très très grande histoire d’amour » tricotée et détricotée par Nicolas (Julien Doré) et
Dorothée (Marina Hands), des Deux-Sèvres à la capitale. Leur épopée sentimentale chemine au gré de transgressions plus ou moins craintives et volontaires des interdits et des devoirs imposés par
leur culture de tradition chrétienne (chasteté, caractère sacré du mariage, etc.) et voit les deux amoureux passer par tous les niveaux de l’échelle sociale. Dans le désordre coiffeur, rentier,
sans-abri pour lui et couturière, ouvrière, épouse entretenue pour elle. Les incidents qui causent tous ces changements brutaux de vie sont traités de manière absolument anti-spectaculaire, et
n’importent quasiment que pour leur efficacité comique. Ils ne sont ni des sujets de tourment ni des racines de nouvelles branches du récit. [Encore quelque chose dont on a l'habitude chez Wilder
: aucun des problèmes posés, quelle que soit sa gravité, ne prend jamais une dimension sociologique, morale ou psychologique].

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Ensemble… est constamment dans un état d’apesanteur, et nous fait pleinement profiter du sentiment de douce griserie qui va avec. Hands la comédienne expérimentée
(mais plutôt dans des drames et très peu dans des comédies) et Doré le débutant complet évoluent dans cette fantaisie sans attaches comme des poissons dans l’eau. Leurs compositions d’ingénus
construites sur des bases simples – pour elle un air gentiment ahuri en toutes circonstances, pour lui un accent du Sud pas possible – sont tout à fait dans le ton ; presque sans filet mais
parfaitement respectées par Thomas, qui place son regard au même niveau que le leur, sans jamais les prendre de haut. Elles ne sont dépassées en folie et en exubérance que par le styliste
sourd-muet inventé par Guillaume Gallienne, qui élève à lui seul la seconde moitié du film à des hauteurs comiques stratosphériques. Avec ces trois là, et en l’absence de tout souci ou thème
parasite, vous n’avez pas fini de rigoler.

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