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- Rockumentaires : Miroir noir (Arcade Fire) et A cross the universe (Justice)
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Où ?
A la maison, en DVD pour A cross the universe (acheté avec le monumental CD live de Justice) et en version téléchargée sur le site d’Arcade Fire pour Miroir
noir
Quand ?
Jeudi et vendredi matin
Avec qui ?
Ma femme
Et alors ?
Les canadiens d’Arcade Fire et les français de Justice ne se rencontreront peut-être jamais. Il est même envisageable que ces deux groupes n’écoutent pas la musique de l’autre. Mais les hasards
du calendrier font que sont sortis de manière presque simultanée – bien que par des voies différentes, cf. le paragraphe « où ? » un peu plus haut – deux documentaires sur ces groupes
devenus dès leur apparition des acteurs majeurs de la scène musicale. Les deux films, Miroir noir et A cross the universe, se rejoignent sur pas mal d’aspects
formels (le documentaire « on tour » est cela dit un genre parmi les plus calibrés qui soient) : durée courte, d’une heure ou à peine plus ; alternance irrégulière d’extraits
de concerts et de virées backstage ; exploitation massive de la musique du groupe comme bande-son de l’ensemble du documentaire.
Plus intéressante est la convergence des deux films sur un point de fond. Tant Miroir noir que A cross the universe vont à reculons d’une attitude de groupie
cherchant à s’introduire dans l’intimité de leur sujet par tous les moyens disponibles. L’un comme l’autre prennent comme point de départ l’idée que le groupe est une boîte noire impénétrable, un
miroir sans tain sur lequel les fans projettent quantité de choses d’eux-mêmes. Ce transfert complexe et troublant est exprimé de manière explicite dans Miroir noir – par son
titre bien sûr, et aussi par la retranscription de messages audio laissés par des anonymes sur le répondeur mis en place par le groupe au cours de la promo virale pour leur deuxième album
Neon Bible. Des fans les plus exaltés (et dégageant une impression qui peut être touchante ou perturbante) aux contempteurs les plus virulents, en passant par ceux qui appellent pour
s’épancher sur des sujets totalement différents, la palette de réactions recueillie est vaste et déborde largement du simple cadre de la musique. Au vu de l’époustouflante puissance des
compositions du groupe, sur album et décuplées en concert (un aspect très bien rendu par Miroir noir), cette brèche ouverte dans l’âme de leur public est passionnante mais en rien
étonnante.
A cross the universe
s’attaque à la même idée, mais d’une manière plus rusée, plus tacite – ce qui le rend plus intéressant cinématographiquement parlant. Comme dans le controversé clip du morceau Stress, le réalisateur Romain Gavras, le producteur SoMe et Gaspard et
Xavier, les deux musiciens / mixers de Justice, jouent avec talent sur l’ambiguïté entre un engagement sincère dans la rébellion, la colère, l’anarchie (autant de sentiments violents qui
alimentent la musique techno, en particulier celle de Justice), et l’exploitation commerciale branchée et faussée de telles révoltes. Dans Stress, cela donnait une vraie fausse
expédition punitive dans une cité, manipulant les mauvais clichés sur les banlieues. Au fil de A cross the universe, qui suit la tournée américaine du groupe, il s’agit de
mélanger séquences de pur documentaire – les conversations avec le chauffeur du bus de tournée – et passages qui donnent un sentiment de scénarisation a priori (visites de villas de luxe à L.A.,
emploi d’une voix-off, soirées de débauche totale avec des groupies…) ; et ce jusqu’à rendre indiscernable la limite entre réalité et fiction. Un point de non-retour qui est atteint dans la
dernière séquence du film, où un montage au choix réel ou astucieux fait alterner une baston sur un parking entre Xavier et un jeune bourré, le concert joué par Xavier avec une main en sang, et
enfin son arrestation par la police après le show. Que tout cela soit véridique ou simulé, la réussite de A cross the universe, et plus généralement du
« concept » Justice, se joue à un autre niveau : ils ont parfaitement saisi le brouillage des valeurs et des niveaux de réalité qui se développe aujourd’hui, et qui peut pousser des
gens à transposer sur de la musique des choses qui vont bien au-delà.