• Les indestructibles, de Brad Bird (USA, 2004)

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Où ?

Chez mon frère, en DVD zone 2

 

Quand ?

Mercredi soir

 

Avec qui ?

Mon frère (duh !)

 

Et alors ?

 

Pixar ne fera sans doute jamais mieux que Les indestructibles. En partie car Pixar ne se mettra sans doute jamais autant en danger – les longs-métrages qui ont suivi celui-ci ont
commencé à le démontrer – qu’avec ce film, pour lequel les responsables du studio ont donné carte blanche à un complet outsider, Brad Bird, arrivé avec son scénario sous le bras, son
équipe de fidèles et son expérience dans les dessins animés en 2D et au crayon de papier, aux thématiques aussi bien enfantines qu’adultes – le plus connu étant le superbe Géant de
fer
. L’association entre Pixar et Bird allait forcément faire des étincelles (lesquelles donnent d’ailleurs un certain intérêt au making-of par ailleurs saturé en « amazing
people »
et « great adventure »). Elle était aussi la meilleure combinaison possible, celle des moyens et de l’ambition, de la confiance et de l’exigence, pour faire
passer le film d’animation dans une autre dimension.

A l’échelle de son genre, Les indestructibles est une spectaculaire superproduction. Des décors à ne plus savoir où donner de la tête, une ambiance visuelle d’une originalité
renversante et fignolée jusque dans ses moindres détails (on en découvre de nouveaux à chaque visionnage), une histoire dont les enjeux évoluent en permanence… il y a plus d’idées de péripéties
et/ou de gags dans une seule séquence du film que dans un dessin animé entier d’un des concurrents. Et le couple Mr. Incredible – ElastiGirl est plus fouillé et plus complexe que tous les
personnages de tous les dessins animés des concurrents réunis. Avec ces deux héros, un film d’animation hollywoodien se propose enfin de s’adresser aux adultes sans que ceux-ci aient à faire
ressortir leur côté enfantin ou ado. Et je ne parle même pas du personnage d’Edna Mode, fascinant d’ambiguïté entre la sympathie que génère son exubérance et les bases peu engageantes de ses
convictions profondes (le super héros comme demi-dieu évidemment supérieur au reste de l’humanité).

Pour citer Nietzsche (ou peut-être est-ce Janet Jackson dans Free Xone), le credo de Bird pour Les indestructibles devait être « One rule : no
rule »
. Surmotivé par son idée de long-métrage, une famille de super-héros rangée des affaires par la force des choses et obligée de confronter « le fantastique au
quotidien »
comme il le dit dans son excellent commentaire audio, Bird refuse toutes les contraintes communément admises et endurées en silence qui sont soi-disant liées à l’animation.
Il multiplie ainsi les formats visuels (l’ouverture en forme d’interviews TV en studio), les jeux sur la distance focale, les éclairages travaillés et non pas uniquement fonctionnels… Seuls
l’intéressent les avantages qu’il y a à donner vie à son bébé à l’aide des images de synthèse, qui convergent tous vers la possibilité de créer de toutes pièces un monde alternatif, décalé,
irréel mais vraisemblable.

Un monde qui, après une introduction détournant astucieusement le point de départ du comic Watchmen, prend la forme d’une utopie ressuscitant l’esprit James Bond des premiers temps. Des gentils charismatiques et spirituels dotés de
gadgets surpuissants (les costumes d’Edna Mode remplaçant les inventions de Q) y affrontent des méchants mégalomaniaques tapis dans leur base secrète camouflée sous une île tropicale, sur fond de
musique délicieusement jazzy – superbe partition de Michael Giacchino – et dans des scènes d’action époustouflantes. Dans des séquences comme les deux combats entre Mr. Incredible et
l’« Omnidroïde », ou la course-poursuite entre Dash et les drones ennemis, la virtuosité du découpage, le souci permanent de rajouter de nouveaux éléments pour relancer l’affrontement
et le rythme effréné de l’ensemble laissent pantois d’admiration. Voire même ridiculisent bon nombre de films d’action tournés en prises de vue réelles. D’une manière générale, le résultat de
cette détermination suprême et du débordement d’idées dont est capable Bird est inouï. La splendeur des images, et la désinvolture de leur enchaînement pendant 1h45, sont un exemple de ce que le
cinéma peut offrir de meilleur. Le débordement se prolonge d’ailleurs sur le DVD ; voir les scènes coupées toutes aussi pertinentes que le contenu du montage final, et surtout les deux
courts-métrages inédits et intimement liés au film : le déchaîné Jack-Jack attack, et le pur bijou d’humour au second degré qu’est le faux dessin-animé des années cinquante
sur les aventures de Mr. Incredible, Frozone… et un lapin.

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