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- Le pire film de tous les temps ? 10000, de Roland Emmerich (USA, 2008)
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Où ?
A l’UGC George V, dans la grande salle. Un choix de programmation surprenant alors que le film est en 2è semaine, est très (très très très) mauvais et fait un four au box-office.
Quand ?
Le lundi de Pâques, à midi, pendant qu’une fugace et incongrue averse de neige fouettait les Champs-Élysées.
Avec qui ?
Ma femme, devant qui je m’étais engagé qu’il s’agirait d’une bonne tranche de rigolade – pari tenu. Par contre, je ne connais pas la teneur des motivations de la dizaine d’autres spectateurs
égarés dans la salle.
Et alors ?
Roland Emmerich avait déjà à son actif des coups d’éclat comme Independance Day (Ah, les extraterrestres ultra-avancés technologiquement mais vulnérables à un bourre-pif
de Will Smith et à un virus sur disquette 5 pouces 1/4 !) et Godzilla (Oh, les français qui donnent naissance à la créature avec leurs essais nucléaires et qui
parlent américain en imitant Elvis Presley tout en mâchonnant du chewing-gum !). 10000 est son chef d’œuvre, son zénith, l’expression de la plénitude de son génie
comique involontaire. Le charme opère dès les 1ères minutes, grâce à des acteurs aussi crédibles en hommes des cavernes que ce que permet leur statut de beautiful people californiens à
peine maquillés par un peu de terre sur le visage et des dreadlocks sales. Le fait qu’ils déclament leurs répliques dans un anglais parfait, tout en adoptant des postures et mimiques dignes d’un
soap opera à la Beverly Hills complète la perfection irrationnelle du tableau.
En plus de posséder la fadeur propre à toute photocopie basique du schéma « les méchants enlèvent la copine du gentil et le gentil et ses amis les poursuivent envers et contre tout »,
le scénario de 10000 réussit l’exploit d’être suffisamment expédié pour qu’on n’y comprenne malgré tout rien. Les séquences s’enchaînent sans lien logique, les ébauches
de conflits se résolvent d’elles-mêmes le temps d’un changement d’axe de caméra. Cerise sur le gâteau, le tout est filmé et monté a minima, en une bouillie épileptique de gros plans – ce qui rend
la plupart des scènes d’actions illisibles.
Ces dernières mettent en scène un bestiaire qui restera assurément dans les annales des pires réalisations du genre. On a droit successivement à L’attaque des autruches géantes (qui font
des bruits de dindons), au Tigre hydrocéphale polyglotte (il comprend l’anglais, mais ne met à profit ce talent que le temps d’une scène aussi courte qu’inutile) et enfin, pour le
bouquet final, aux Mammouths en goguette chez les pharaons. Car oui, 10000 ose le saut temporel de 5000 ans pour envoyer ses héros à l’âge des pyramides,
lesquelles ont été bâties par une race extraterrestre despotique mais renversée par une révolte d’esclaves semi-improvisée et éclair (5 minutes montre en main). On rigolait déjà sincèrement
depuis le début, on en vient à pleurer de rire dans ce dernier acte.
Plus mauvais film de l’année, 10000 est déjà presque assuré de l’être. Emmerich vise clairement plus haut – la postérité. Il l’atteint avec panache, en se hissant à un
niveau où seuls les navets spécialisés et fauchés peuvent rivaliser. Toutefois, une fausse note empêche le film d’entrer dans le nirvana des merveilles du kitsch, là où la nullité est élevée au
rang d’art majeur : la vision géopolitique rance qu’il transmet. Dans 10000, les gentils blancs parlent anglais, les gentils noirs courent vite et se mettent
volontiers au service des gentils blancs, les méchants arabes sont laids, brutaux et parlent une autre langue laide elle aussi. S’il veut faire encore mieux, Roland Emmerich devra se défaire de
telles prises de position qui n’ont rien à faire dans navet pur jus.