• Australia, de Baz Luhrmann (USA-Australie, 2008)

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Où ?

Au ciné-cité les Halles

Quand ?

Mardi soir, en avant-première

Avec qui ?

Ma femme

Et alors ?

Certaines personnes vouent dans l’absolu une haine immuable à Baz Luhrmann et à ses films, qu’il s’agisse de son adaptation de Roméo et Juliette ou du monumental Moulin
Rouge
. Que ceux-là ne se donnent même pas la peine de se déplacer pour subir la dernière création du réalisateur australien ; le film dure 2h48 et prête encore plus le flanc à la
critique que les deux longs-métrages cités plus haut. Et surtout, Luhrmann n’a certainement pas renoncé à son kitsch inimitable et tellement sincère, qui chez lui remplace dans tous les
compartiments de la mise en scène les règles auxquels n’importe quel autre réalisateur s’astreint – citons principalement le montage (mépris des distances entre les lieux, ellipses à outrance),
la photographie (couleurs clinquantes, effets spéciaux volontairement voyants), les cadrages (JAMAIS de plan neutre – toujours très larges ou très serrés).


Les autres spectateurs auront peut-être envie de satisfaire leur curiosité, et de voir à quel point ce style Luhrmann est soluble dans un genre autre que le mélange de danse et de comédie
musicale qui l’a vu naître – ici, le mélo épique dans la droite ligne d’Autant en emporte le vent (de nombreuses passerelles scénaristiques et thématiques relient les deux films).
La réponse est mitigée, faisant d’Australia un film qui souffle tour à tour le chaud et le froid. Certains points cardinaux du cinéma de Luhrmann donnent des séquences toujours
aussi saisissantes. Il en est ainsi de sa manie d’ouvrir le film par un long montage frénétique, au choix incompréhensible ou grisant, mettant en scène tous les protagonistes du récit à venir
dans des situations immédiatement rocambolesques et à haut potentiel dramatique (un peu comme cette phrase). Ou de son dogme d’établir la musique comme force transcendante du récit, qui relie les
personnages au-delà des distances matérielles et leur permet de triompher des épreuves – qui se retrouve entre autres dans le cas présent dans les scènes entre le sorcier et le petit garçon
métis, véritable héros du film.


Ce déplacement du cœur de l’intrigue du couple romantique Nicole Kidman – Hugh Jackman vers un duo d’aborigènes montre la volonté de Luhrmann de réaliser une œuvre personnelle et non une énième
grosse machine hollywoodienne. Il n’est pas toujours bien maîtrisé ; le cinéaste doit – et veut – également ménager un certain espace à ses stars, auxquelles il offre des rôles réjouissants, à
cheval entre l’émotion mélodramatique pure et la caricature (Kidman en Lady anglaise très collet monté, Jackman à fond dans l’exploitation de son côté sosie de Clint Eastwood dans les westerns de
Sergio Leone). Australia est du coup plus d’une fois bancal, trop rapide ou trop lent à force de tenter maladroitement de mener ses différentes pistes de front. Ce sont plus des
visions parcellaires qui impressionnent : l’ouverture donc, le convoyage du bétail à travers le désert, le grand bal donné dans la ville de Darwin. Je ne mets pas le bombardement de cette
dernière par les avions japonais dans la liste ; Luhrmann s’y emmêle trop les pinceaux entre les différentes histoires à clore et les morceaux de bravoure à fournir, soit car il est incapable de
faire mieux soit car il était pressé par le temps et les desiderata du studio (dont il est déjà établi qu’il a demandé un changement de fin regrettable). Devant cette fin en demi-teinte, c’est le bénéfice du doute que l’on peut lui laisser, dans
l’attente d’une éventuelle director’s cut à la manière de celles de Kingdom of heaven et King Kong, qui rehaussaient radicalement le niveau du film.


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