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- L’homme qui en savait deux fois trop (1934 et 1956 ; Angleterre, et USA, mais toujours Alfred Hitchcock)
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A la maison
Quand ?
Début novembre
Avec qui ?
MaFemme pour la version de 1934 et seul pour celle de 1956
Et alors ?
La pratique consistant à réaliser dix ou vingt ans plus tard un remake d’un de ces propres films était à Hollywood chose plus courante qu’on ne pourrait le penser dans les années 30 à 50. Entre autres cinéastes Lubitsch l’a fait, McCarey aussi, et donc Hitchcock pour L’homme qui en savait trop. La version de 1934 date de l’époque où il travaillait encore en Angleterre, loin du Technicolor et des stars. Elle dure à peine plus d’une heure, et c’est un véritable concentré de suspense qui n’a pas besoin d’une minute supplémentaire. La tension qu’il dégage est extrême du début à la (presque) fin – le baroud d’honneur des méchants barricadés dans leur repaire et tirant sur tout ce qui s’approche pour les arrêter traîne un peu en longueur. Hormis cela, on assiste à une brillante application des règles élémentaires du suspense cinématographique. Une leçon administrée par un maître.
L’implacable mécanique se met en branle avec l’assassinat de celui qui était – à notre insu ainsi qu’à celui du couple de héros, Bob et Jill – un espion, sur la piste de danse d’un hôtel dans les Alpes où tous les principaux personnages sont réunis. Avant d’expirer, la victime a tout juste le temps de souffler à l’oreille de Bob un message cryptique et incompréhensible pour son récipiendaire. Cet événement soudain vient briser le déroulement d’une scène jusque là comique (à dessein, pour faire diversion), et plus généralement un début de film paisible, débonnaire même. Après lui, de scène en scène le crescendo jusqu’au climax, une tentative d’assassinat lors d’un concert à l’Albert Hall, est incroyablement ludique et excitant. Il y l’annonce silencieuse de l’enlèvement de l’enfant de Bob et Jill, avec la mise en pratique immédiate de la situation de porte-à-faux dans laquelle ceux-ci sont désormais piégés : Bob doit sans attendre trouver un moyen de faire comprendre à sa femme interrogée dans la pièce à côté, et à elle seule, qu’elle ne doit rien dire aux policiers. Il y a ces brillantes amorces de scènes par des gros plans sur les cheveux gominés du tueur à gages, signe distinctif qui préfigure un élément similaire et encore plus mémorable à l’œuvre dans Les trente-neuf marches (les doigts manquants du cerveau des bad guys). Il y a, encore, l’infiltration aux multiples rebondissements chez un dentiste dont le cabinet sert de couverture à l’activité des assassins, et sa séquence miroir à une messe d’une secte servant elle aussi de couverture… Il y a tout ça, et il n’y a aucun temps mort, aucun « gras ». Simplement le plaisir d’un récit à suspense et à surprises et de sa mise en scène parfaite – car chacune des scènes du film est racontée uniquement par le cinéma, par l’image et le montage ; et non par des dialogues d’ailleurs très rares.
La version de 1956 est deux fois plus longue, pour raconter plus ou moins la même chose. Ce nouvel Homme qui en savait trop est typique des films de Hitchcock dans sa période hollywoodienne la plus fameuse – du technicolor, des stars (James Stewart, Doris Day), une durée approchant voire dépassant les deux heures. Malheureusement cet auto-remake dégrade l’original. Et sans attendre : la première demi-heure enchaîne les blagues ringardes à la OSS 117 (sans le second degré) collant à la vision que les touristes américains lambda peuvent avoir de l’Europe et du Maghreb. Cette manière de brosser le public dans le sens du poil en considérant que tout est dû aux héros qui lui servent d’alter-ego est le fil rouge du récit – actif jusque dans l’avant-dernière séquence, qui montre Stewart grommeler contre la souveraineté des ambassades étrangères aux USA. On prend péniblement son mal en patience quand de tels écarts se produisent, et on a alors tout le temps de méditer sur le fait que quand il ne l’utilise pas dans un rôle ambigu et sombre (Vertigo) mais de héros droit et « normal », Hitchcock a bien du mal à faire quelque chose d’intéressant de James Stewart, que ce soit ici ou dans Fenêtre sur cour.
La version de 1934 est un film de cinéma ; celle de 1956 est un film des USA. Ses priorités évoluent en conséquence : en 1934 l’objectif était de nous tenir en haleine par un enchaînement ininterrompu de situations à haute teneur en suspense, en 1956 il s’agit plutôt de générer en nous de l’empathie pour cette « famille américaine paisible » ainsi que la présente le carton d’introduction. Le film rentre dans les clous du mainstream, et endosse la certaine fadeur de cette nouvelle famille. Heureusement, l’association de la mise en scène de Hitchcock et de la musique de Bernard Herrmann repêche plus d’une scène, en créant une tension phénoménale même là où il n’y a rien – l’arrivée de Stewart dans le quartier désert où se trouve le mystérieux Ambrose Chapel, le face-à-face muet dans l’église. La seule véritable amélioration par rapport à la version d’origine intervient à la toute fin. Le sauvetage de l’enfant et la mise hors d’état de nuire de ses kidnappeurs se fait non par l’usage de la force brute, mais grâce à l’intelligence (avec cette chanson qui révèle au garçon la présence de ses parents près de l’endroit où il est enfermé). C’est tard, et c’est peu.
[...] films d’espionnage qui manquent dans la filmographie de Hitchcock ; il en a réalisé dès 1934 (L’homme qui en savait trop), et son antépénultième long-métrage, L’étau, appartenait encore à ce genre. Qu’est-ce [...]